dimanche 26 janvier 2014

Pleurer pour rien


Demander des choses à Dieu n’a rien de très impliquant. On ferme les yeux, on demande, on essuie les larmes, on continue de vivre et on oublie qu’on vient de placer une commande.


Puis, un petit matin comme les autres, on se réveille bandé. Pas bandé physiquement. Bandé dans le cœur. On se sent appartenir à quelque chose de plus grand. On se sent plus fort, plus solide. La vie nous sourit de toutes ses dents. Ça brille tellement que ça fait presque mal. Et puis tout à coup, pour aucune raison apparente, on se remet à avoir peur. Peur de quoi? Peur que ça finisse. Là, on se couche dans la vie jusqu’aux oreilles, et puis on se met à manquer d’air. On suffoque. On ne sent plus rien. Puis, on s’aperçoit qu’on ne bande plus autant qu’avant.

***

Avant de manquer d'air, il se passe d'autres choses. Le signal d'alarme, c'est que tu commences à vouloir être quelqu'un d'autre. Tu voudrais être capable de bouger les membres de ton corps d'une nouvelle manière. Mais comme cette manière n'est pas la tienne, tes mouvements maladroits retournent d'eux-mêmes dans leurs vieux sillons. Et c'est le sabot de Denver.

Tu voudrais une silhouette un peu différente, moins de hanches, des cheveux plus forts, un plus gros membre, tant qu'à faire. Et pourquoi pas deux yeux pas de la même couleur, comme Bowie pis l'autre fendant que t'as croisé à l'épicerie?

Tu voudrais faire du parachutisme, manger du crocodile vivant et grimper des volcans comme le monde dans tes notifications. Socialement, tu voudrais que ta seule présence soit une source intarissable d'énergie et de bonheur, même pour les choses qui ne respirent pas. Un coeur sur deux pattes. Même sur une, tu serais capable. Une aura grande de même. Tu voudrais que le monde parle de toi comme on parle d'une attraction incontournable, quelque chose qui vaut vraiment le détour.

En même temps, tu voudrais te dissocier de la masse, celle qui te respire dans l'oreille à chaque matin sur la ligne orange pendant que tu te cherches dans le métroflirt. Tu voudrais avoir ce petit quelque chose de plus, l'étincelle, le raz-de marée. Mais tu finis toujours par te trouver un petit quelque chose de moins.

Le sais-tu vraiment, ce que tu veux?

Il me semble que tu méditais avant. Ça t'aidait ça. Tu respirais mieux. T'étais moins fatiguant aussi. Tu avais ouvert un espace en dedans de toi. Un gros tuyau invisible qui te passait bord en bord du corps et où la vie circulait librement sans jamais se coincer l'cul dans ta gorge. As-tu une application qui fait ça?

Tu mangeais des légumes et des fruits. Des légumineuses aussi. Tu dormais ton huit heures, faisais ton jogging. T'avais pas besoin de pilules pour rien. T'étais libre en dedans comme en dehors. C'est quoi cette vieille prison-là?

Normalement, c'est là que Dieu commence à te faire de l'oeil: "Pis si tu penses qu'avoir une plus grosse graine va régler toutes tes problèmes mon ti-proutte, j'ai deux trois signes pour toé". Il ne parle pas comme ça, mais c'est ça que ça veut dire.

***

Demander des choses à Dieu n’a rien de très impliquant. On ferme les yeux, on demande, on essuie les larmes et on continue de vivre en essayant de ne plus oublier que nous avons déjà toutes ces choses. 

Et bien plus encore.   



Schmout 








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